Le Projet

Hébergé à l’Université de Victoria et subventionné par le Conseil Canadien de la Recherche en Sciences Humaines, le projet Perfecta emploie une petite équipe d’étudiants, du premier au troisième cycle, à l’élaboration du site documentaire et bibliographique Perfecta (Sources de la première modernité sur la gynécologie). Il organise un colloque international sur Représenter le sexe féminin : Images et imaginaires, 16-21 (date prévue 2021).

Sujet

Dans les années 1520-1560, l’anatomie nouvelle, fondée sur l’observation directe du corps et sur la pratique de la dissection humaine, se donne un objet scientifique : le corps féminin. Dressant le constat de l’insuffisance des théories et connaissances médicales sur la femme, Berengario da Carpi en fait  le programme de recherche et le symbole du savoir médical. Par la dissection, les interventions chirurgicales et les naissances, les médecins découvrent  le corps féminin, en nomment les parties, et en décrivent l’intégrité. La perfection du corps humain, de long temps pensée comme perfection du corps masculin, se décline-t-elle désormais au féminin ?

Le présent projet examinera l’acquisition et le retentissement de ces connaissances scientifiques, déjà souvent narrées dans le cadre d’une histoire du progrès médical, dans le contexte du statut de la femme : plus précisément, on mettra en regard le discours scientifique sur les organes féminins d’une part et, d’autres parts, les nus féminins artistiques, les controverses sur l’égalité des sexes, la définition des genres et le difficile discours des identités sexuelles. Plaçant au centre de cette recherche, tel un pivot, la description anatomique de l’appareil génital féminin —plus traditionnelle, la description des seins ne porte pas les mêmes enjeux—, le projet décrira ainsi les transformations corrélées de l’anatomie, de la représentation et du statut de la femme.

Le sujet met ainsi en perspective les rapports entre science et culture, depuis un exemple à la fois précis et essentiel : l’explicitation de la différence des sexes. La Renaissance — période où la science s’affranchit des autorités reçues pour mettre en avant l’observation, la vulgarisation et le questionnement—, transforme à partir de l’anatomie, la définition de la femme et des sexes, en Italie, puis en France et partout en Europe de l’ouest : les pratiques de contrôle du plaisir et du corps féminins, mutilation génitale et preuves de la virginité, sont contestées par les anatomistes, avant de disparaître, à des rythmes divers, de l’espace collectif ; les conventions de représentation du corps féminin changent également, tandis que l’égalité des sexes dans leur différence devient un sujet majeur.

Novateur dans la publication de sources latines peu connues, le projet l’est également par sa méthodologie : la mise en dialogue de la découverte médicale avec le discours sur l’égalité des sexes et les représentations de la femme, qui fera valoir la portée du discours scientifique sur les cultures et sociétés dont il est issu. Sans doute, cette étude d’objets pour la plupart disparus de nos cultures permettra de saisir les réseaux et modalités de diffusion du savoir et des idées nouvelles ; cet apport permettra, à son tour, de penser les moyens d’affirmer et répandre le concept de dignité du corps féminin par-delà la Renaissance.

Ambitions

L’on verra comment le discours et le regard anatomiques s’inscrivent dans les sujets de leur temps mais aussi comment ils questionnent et transforment les conceptions de leur culture.  En effet, l’on ne saurait exclure du récit de la mise en lumière et en mots du corps féminin le cadre intellectuel qui la rend possible : le nouvel esprit scientifique, bien sûr, mais aussi l’idée de l’égalité des sexes et la dignité du corps humain dans toutes ses parties. Dans les livres d’anatomie, la représentation du corps féminin rencontre l’usage de la nudité dans l’art la Renaissance, tandis que la tradition le réservait aux dieux et déesses. Cependant, la nudité féminine a un statut bien différent de celle de l’homme : elle bouleverse les conventions d’une pudeur, alors réputée « naturelle », de la femme. La description anatomique de l’appareil génital féminin transgresse une théorisation du genre féminin, dont la cohérence couvrait tant la morale et le comportement que la définition biologique. L’une des conséquences les plus importantes du discours de la médecine savante sur la femme est la remise en question des pratiques de mutilation génitale féminine : attestées par les médecins, elles sont dès 1559 explicitement condamnées.

À la fois expression ou source du nouveau regard porté sur la femme à la Renaissance, le discours médical savant contredit en effet les savoirs admis de son époque non seulement sur les parties du corps féminin mais également sur le rapport des sexes entre eux, sur leur hiérarchie et sur le plaisir. Il se lit en relation avec le renouveau de la querelle des femmes, et notamment son épisode sur la « parfaite amie » dans les années 1540, avec les débats sur la vulgarisation de la science, avec les représentations artistiques et avec le nouveau moyen de communication du livre imprimé. L’on ne saurait donc exclure du récit de la découverte anatomique ses résonnances culturelles et sociales : l’anxiété avérée sur l’identité sexuelle ; la reconnaissance, dans le discours gynécologique, de l’intégrité du corps de la femme et de sa capacité au plaisir ; la mise en doute des preuves traditionnelles de la virginité ; la légitimité de la représentation du lieu, auparavant aveugle, de l’« origine du monde ».

Bien sûr, culture et publications scientifiques ne suivent pas les mêmes rythmes : les décalages chronologiques entre le discours anatomique et l’abandon des mutilations génitales féminines en Italie et en France, montrent la césure entre érudition et société. Bien au-delà du seizième siècle, l’ « inutilité » du clitoris est citée pour en justifier l’ablation (Liébault, 1585, 1617) et il faudra abandonner la téléologie aristotélicienne et galénique — qui veut que chaque partie du corps ait une fonction utile — pour en saisir toute la violence. La recherche de l’hymen et les interrogations sur les preuves de la virginité participent également au changement social amorcé par l’enquête anatomique. Enfin, privée de dimension publique, la nudité féminine demeure longtemps pornographique, quand le David de Michel Ange ou le Persée de Cellini sont perçus comme des célébrations humanistes du corps humain : le tableau de Courbet L’Origine du monde fait toujours scandale en 1866, et même en 1995 lors de son acquisition par le Musée d’Orsay.

Les relations de cause à effet sont difficiles, si ce n’est impossible, à déterminer pour des phénomènes culturels en corrélation (Freedberg 1989). Leur co-présence n’est néanmoins pas insignifiante et offre des catégories pertinentes pour décomposer nos propres constructions culturelles : le détour par l’histoire permet de voir au-delà de l’angle mort de nos a priori et de poser un regard critique sur nos représentations. Il semble difficile, en 2017, de croire que l’anatomie féminine était un mystère opaque jusqu’en 1560. Mais en 1521, il était tout aussi difficile de penser la perfection du corps au féminin. « Rappeler les certitudes du passé permet de questionner les évidences contemporaines.» (Gardey 2006, 650)

La croisée des disciplines

Interdisciplinaire dans sa définition même, le projet met en œuvre un dialogue entre les histoires de la médecine, du livre, de l’art, de la littérature et du genre pour saisir, par le biais de la notion de perfection féminine, l’interrelation entre science, mentalité et société. Il empruntera aux disciplines leurs objets distincts (les parties du corps féminin, le discours et la description du corps par le livre, les œuvres d’art et leurs conventions, les pratiques et discours sur la femme, les pratiques attestées de mutilation) pour mettre en lumière leur concomitances et leurs écarts. Il s’attachera surtout à la construction et à la reconstruction du genre, guidé par la critique féministe : l’objectif final ne réside donc pas tant dans l’établissement des découvertes anatomiques ou même celle de la chronologie d’un changement complexe que dans l’exploration des connections entre l’imaginaire du genre et les domaines du savoir. Les médiations du livre et de l’art en forment la documentation.

Contextes : un écheveau à transformer en tissage

La perfection de la nudité féminine : enjeux

« Hélas, hélas ! Où Praxitèle m’a-t-il vue nue ! »(Anthologie grecque, XVI, 162.) Ainsi se lamente Vénus lorsqu’elle découvre à Cnide la statue qui la représente, nue, une main devant le sexe, l’autre tenant son vêtement. Célèbre dès l’Antiquité, la Vénus de Cnide connut à la Renaissance un succès renouvelé : François Ier fit ainsi faire un moulage de la Vénus du Belvédère (Muller-Dufeu 2002, 493) et Vésale en emprunta le buste pour montrer les viscères de la femme (Vésale 1543, 377). L’image de la nudité féminine, au XVIe siècle, heurte les habitudes de la pudeur (Brancher 2003 et 2015), d’autant que cette liberté n’est plus celle des seules déesses (Didi-Huberman 1999). L’œuvre inscrit le corps féminin dans une nouvelle dignité : celle de la perfection, recueillie de l’art classique (Comar 2008 ; Laurenza 2003). Or, de long temps, le corps féminin avait été défini, justement, par son imperfection : commentant l’Anatomie  de Mundino dei Luzzi (1270-1326), l’anatomiste Jacopo Berengario da Carpi (1460-1530) expliquait encore en 1521 l’infirmité constitutive de la femme :

Tout comme l’homme est la forme la plus parfaite de tous les animaux, ainsi, au regard du corps féminin,  le corps masculin est le plus parfait. La cause de cette perfection est l’excellence de sa chaleur. En effet, le premier outil de la nature est la chaleur. Ainsi, nécessairement, les créatures qui en manquent sont imparfaites. Il n’y donc rien d’étonnant que le corps féminin soit moins parfait que le corps masculin, d’autant qu’il est plus froid. […] Aussi, à l’endroit des parties génitales, la femme est moins parfaite que l’homme (Berengario 1521, CCIX v°, ma traduction).

En un coup d’éclat, peu étudié par l’historiographie, l’anatomiste (Berengario1521, CCXI) nuança immédiatement cette introduction dans la tradition galénique : dans ses Commentaires  et dans les Isagogae (Berengario1523, [F]), il montre les insuffisances de la théorie jusque-là admise. Là, il fait exécuter (Park 2006, 191 ; Serra-Zanetti 1959) la première représentation réaliste de la femme (Premuda 1957) dans un livre imprimé : nouvelle Vénus, de sa main gauche, elle lève le voile qui la cachait au  regard;  de sa main droite, elle montre sa « matrice », posée sur une stèle ; de son pied gauche, elle foule les livres d’anatomie, qui ne suffisent plus pour comprendre le corps ; debout, elle laisse voir les lèvres de son sexe. Telle l’allégorie d’une anatomie encore à venir en 1521, fondée sur la dissection et sur l’observation directe, elle ouvre une nouvelle représentation du corps humain (Moe 1995 ; Schultz 1985 ; Roberts et Tomlison 1992), qui n’est plus exclusivement masculin. Contrevenant aux codes et usages de la pudeur ( Simons 2002), l’image confère une nouvelle dignité à la femme : la perfection du corps humain, que célèbrent les traités d’anatomie et les nus artistiques. Nous étudierons la nouveauté et l’impact de cette image, peu connue ou commentée.

L’allégorie et le trophée de la nouvelle anatomie : science et symbole

Rompant avec une longue tradition médicale où seuls les organes de la reproduction étaient décrits (Corbin 2005 ; Laneyrie-Dagen 2006 ; Rifkin 2006), Berengario fait en effet voir un corps féminin dans son entier, qui se montre lui-même et désigne ce que la main de Vénus ou la feuille de vigne dérobaient à la vue. Dans le même chapitre, le professeur d’anatomie –Berengario enseigna à Bologne de 1502 à 1527 (French 1995 ; Putti) – démontre l’inadéquation des descriptions classiques et médiévales du corps féminin et lance, comme programme scientifique, la « découverte » et la compréhension des organes génitaux de la femme : «  on ne peut rien comprendre de la matrice d’après la dissection d’une seule matrice; il faut faire en l’anatomie sur les organes de plusieurs individus. » (Berengario 1521). Devenue devenue l’objet symbolique (et réel) de la nouvelle médecine, l’anatomie féminine est le trophée des dissections (Andernach, Dryander, Estienne, Vésale, Paré, Valverde, Columbo, Fallope et Vassé, pour ne citer que quelques-uns d’entre eux). Vésale choisit pour le frontispice de La Fabrique (1543) la scène de dissection d’un corps féminin, avant que se succèdent les « découvertes » — du clitoris par Columbo (1559 ; Russell 1953 ; Park 1996 ; Clément 2001) et des trompes de Fallope (Fallope 1563).

L’histoire de la médecine a parfois salué ces progrès (Mortazavi 2013) comme une accumulation linéaire des savoirs sur le corps, dont les épisodes seraient constitués par la nomination scientifique des parties anatomiques et dont « les grands médecins » — en particulier, Vésale (Cazes 2015 ; Koyré 1973) — seraient les héros. Historiens et historiographes ont averti des réductions anachroniques de ce récit fondateur de la médecine (Bynum et Porter ; Cunningham et Williams 1993 ; Grmek 1997 ; McVaugh et Siraisi 1990 ; Sakka 1997). Les progrès scientifiques ne s’ajoutent pas les uns aux autres comme les marches d’un escalier se succèdent mais procèdent par essais, tâtonnements, échecs et réévaluation (Kuhn 1974 ; Wootton 2015). Surtout, ils prennent place dans une société, dont ils reflètent la culture tout autant qu’ils peuvent la transformer.

Une histoire des savoirs : le kaléidoscope des disciplines

Le décloisonnement disciplinaire apporte ici contextes et complexités. Car les nouveaux savoirs anatomiques ne sauraient être situés en dehors du rapport aux traditions classiques de la médecine (King 2003 ; Nutton 2002 ; Sarton 1955 ; Siraisi 1997) ni de l’épistémologie de l’autopsie (French 1985 ; Mandressi 2003; Pardo-Tomas 2004;  Premuda et Ongaro 1965 ; Siraisi 1990  et 2008) qui demande de « voir pour savoir » (Cazes 2002). La chirurgie, puis la dissection, sont désormais à l’avant-garde de la médecine (Le Breton 1993 ; Park 1994 ; Pouchelle 1983). La technologie du livre imprimé reproduit cette connaissance par la vue en développant de nouveaux formats du texte  scientifique (Carlino 1999 et 1999a ; Pesenti 1985): les gravures que Berengario joint à ses commentaires (1521) et abrégés (1523 semblent modestes au regard des somptueux traités d’anatomie, illustrés en pleine page (Estienne, 1545-1546  ; Vésale 1543 ; Cazes 2012), où le lecteur peut voir, par lui–même, « l’ombre de la dissection » (Cazes 2015 a). Le présent projet veut mettre en lumière les valeurs symbolique et culturelle de la science du féminin, par l’utilisation, la connexion et l’analyse de ces connaissances disciplinaires au prisme de l’anatomie féminine.

Histoire de la médecine : le lieu et le statut de l’anatomie

En donnant à voir ce qui est invisible au regard quotidien, l’anatomie ouvre, littéralement, l’enveloppe du corps. Pour la femme, cette exposition est redoublée car la conception galénique veut que, par nature, « la femme porte à l’intérieur ce que l’homme porte à l’extérieur » (Galien 1968, 2, 628). Intro- ou rétro-verti, l’appareil génital féminin est le lieu aveugle de l’anatomie médiévale, qui souvent répète, parfois sans bien lire, les rares passages de Galien sur la femmes (Kudlien 1965 ; Lemay 1985) ou le Livre des Maladies des femmes de Soranos (Drabkin et Israel 1951). L’anatomie pratique prônée par Berengario force le « regard empêché » (Thomasset 1993), par lequel la nature aurait protégé la pudeur ; elle reste à étudier dans cette rupture symbolique. Les traités médiévaux sur la médecine des femmes (Gélis 1984 et 1988 ; Knibiehler 1982 et 1983 ; McClive et Pellegrin 2010 ; Whaley 2011), tels la Trotula (Green 1996, 1997, 1998 et 2013) ou les nombreux Secrets des dames (Corsi, Hordynsky-Caillat et Redon 1988) s’attachaient à la « faiblesse » du corps féminin, à la gestation et aux épreuves de la naissance. De fait, la littérature gynécologique (Berriot-Salvadore 1991 et 1992 ; McLean 1980 ; Schleissner 1994 ; Worth-Stylianou 2007 et 2009), tout comme les chapitres des traités de médecine générale, réduisaient le corps de la femme à sa « matrice », terme vague qui comprenait tout l’appareil reproductif. Cette fragmentation (Hillman et Mazzio 2013 ; Mazzio et Hillman 1996 ; Park 2002 ; Sawday 1995) et dévalorisation du corps féminin mènent à une conception de la différence anatomique par « parties du corps » (Stolberg 2003) : le féminin, dénué de cohérence comme de force, est un défaut, défini comme ce qui s’écarte du modèle masculin. Or, le savoir anatomique reconnaît le corps féminin comme une œuvre de nature, et par là, une perfection. Ici, la médecine, comme les représentations qu’elle produit, touchent aux hiérarchies des sexes et des genres, comme au plaisir. La recherche mettra en lumière l’impact intellectuel de ces sources médicales, qui changent le statut de la femme.

Théorie du genre : l’égalité en perfection

La différence des sexes n’est pas une donnée immédiate pour la science, qui serait isolée de l’organisation des sociétés et des représentations culturelles. La critique féministe (Gardey 2004 et 2006  ; Héritier 1996 ; Hurtig, Kall et Rouch 2002 ; Oakley 1972) et la théorie du genre (Beauvoir 1949 ; Butler 1990, 1993 et 2004) ont montré que la reconnaissance des différences sexuelles a une histoire (Muir et Ruggiero 1990 ; Schiebinger 1993) dont la science se fait l’écho (Bleier 1984 ; Fausto-Sterling 1985 et 2000) et parfois l’instrument (Cadden 1995 ; Lowy 1995). L’enjeu du discours anatomique sur la femme dépasse ainsi la médecine proprement dite et concerne, dialectiquement, le statut de la femme. On a souvent évoqué la « masculinisation » de la médecine des femmes, à la Renaissance, comme un contrôle exercé sur le corps féminin par l’homme, en ses discours et ses gestes (Rousselle 1983 et 1991 ; Green 2008 et 2008a). C’est néanmoins le discours médical savant, en latin, masculin, (French 2003; Jacquart 2014 ; McLean 2002), qui bouleverse l’imaginaire du corps, la division des sexes, la construction sociale du genre et les conventions artistiques pour y établir la dignité de la femme. Peu explorés par la critique, les discours médicaux sur l’égalité en perfection de la femme fondent en droit les revendications des femmes au respect et à la dignité. Notre recherche a pour ambition de le montrer et d’en faire voir les modalités.

Ainsi, les onze images de la femme « en pied » et non plus de sa seule « matrice », publiées dans La Dissection du corps humain  par Charles Estienne en 1545 (Huard et Grmek 1965)  représentent des personnes, dans leur intégrité. Mais où mettre la femme dans un discours universel sur l’humain ? La présente recherche examinera les choix de composition du discours anatomique : la femme y est-elle réduite à sa différence d’avec l’homme ou présentée comme un corps cohérent ? Une première conférence, donnée en avril 2017, m’a permis d’établir la diversité des réponses fournies par les traités de la Renaissance. Elle confirme la pertinence de cette lecture rhétorique des ouvrages médicaux : dans la composition de l’exposé médical, se dit une conception du corps, du sexe et du genre.

Identités sexuelles et anxiétés sur le genre

La tension entre l’universalité du modèle scientifique et la dualité des sexes reflète une vive anxiété culturelle quant à l’identité sexuelle. En effet, la conception d’un « sexe faible » repose sur un modèle exclusivement masculin du corps humain, dont la « forme féminine », comme dans la Bible (Genèse, I, 27) serait seconde. Correspondante, similaire, rétro-vertie, l’anatomie féminine serait de même nature que celle de l’homme, sans jamais cependant lui être semblable. La distinction sexuelle est, du coup, sans cesse menacée, tantôt par la simplification, tantôt par l’incertitude quant à la nature permanente de l’identité sexuelle : Thomas Laqueur a proposé, puis nuancé,  l’idée que la différence sexuelle est radicalement moderne (Laqueur 1990 et 2003). La controverse nourrie  ouverte par ses propositions a fait valoir la complexité des documents (King 2013 et 2017; Park 2010). L’hésitation sur le sexe n’est pas propre aux XXe et XXIe siècles : discours et pratiques de la Renaissance expriment une profonde anxiété sur l’identité sexuelle (Braunschnieder 1999 ; Park et Daston 1981 et 1995 ; Pomata 2001; Schleiner 2000). Quels sont les rôles et fonctions du savoir anatomique dans l’expression et la résolution de ces tensions ?

Mutilations et hymen

Ces controverses médicales puis historiographiques sur le partage sexué ne sauraient être dissociées des pratiques anciennes de mutilation génitale féminine, usage attesté par les textes médiévaux de la Trotula mais aussi par les discours savants de Berengario (1521) et, plus tard, les œuvres de vulgarisation de Jean Liébault (1585). Or, la célébration de la perfection anatomique féminine remet en question la légitimité de cette violence : Berengario feint de ne pas la comprendre et Columbo vante le clitoris pour le « plaisir qu’il procure ». Ainsi, débutent les recherches médicales qui aboutiront, bien plus tard, à la définition de l’orgasme. Cette nouvelle définition de l’intégrité corporelle se continue dans les premières investigations médicales sur les preuves de la virginité, auparavant exclusivement traitées par les sages-femmes. Estienne, Vésale et Columbo remettent en doute l’existence de l’hymen chez les vierges. Dès lors, l’anatomie mène à une réflexion sur la sexualité (Encarnacion 2001 ; Gilman 1989), la société et ses usages. Les images de dissection illustrent les interrogations nouvelles par leurs emprunts aux représentations érotiques ( Cazes et Carlino 2003 ; Kellet 1955 ; O’Frantz, 1989 ; Talvacchia 1999). Le discours anatomique change-t-il les pratiques et normes sociales ? La critique ne s’est pas penchée sur ces implications, qui forment nos questions de recherche.

Célébrations et querelles des femmes   Enfin, l’histoire du corps féminin à la Renaissance s’inscrit dans l’interminable querelle des femmes (Amore et Lardy 2014 ; Blamires 1997 ; Darmon 2017 ; Rochefort et Viennot 2013) : objet nouveau du discours d’autorité, elle questionne la division et la hiérarchie des genres, tout comme les pratiques, traditions, et conventions qu’elles fondent. Quand la geste humaniste remet en cause les autorités transmises par la scholastique (Grafton, Shelford, et. Siraisi 1995) et invente la dimension publique de la science, en opposition aux secrets des alchimistes et anciens médecins (Eamon 1985 et 1994 ; Long 2001; Newman et Grafton 2001), l’anatomie de la femme est le symbole du « nouvel esprit scientifique » des années 1520-1560. En effet, le nouveau corps féminin engage une représentation des sexes et des genres qui, tout en restant basée sur le discours antique et médiéval, souligne les limites du modèle hippocratique de concordance des sexes et implique une reconnaissance de l’égalité. Les discours médicaux rencontrent ainsi les traditions littéraires courtoises et pétrarquistes de l’amie parfaite, dont le corps est célébré en blasons et sonnets, tout comme la « querelle de la parfaite amye », qui prend place dans les mêmes décennies et pose la question de l’amitié, c’est-à-dire de l’égalité humaniste– entre homme et femme. Cette rencontre, peu étudiée  fait l’objet de notre enquête.

Bibiliographie (de départ et déjà obsolète)

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